
The Room
Je
pense inutile de commencer cet article en rappelant combien l’œuvre de Lovecraft peut influencer les
musiciens. Il me semble tout aussi inutile de conforter ce propos en précisant
que la majorité des groupes qui rendent hommage, s'inspirent ou pillent cette
œuvre est du genre Metal, voire plus précisément Black Metal.
Bon, il
est vrai que l'ambiance des nouvelles ne prête pas trop à la rigolade, ni ne
donne dans la godriole. Il est donc normal que ce genre qui flirt avec l'image
satanique, dont la musique donne plus souvent envie de se jeter à l'eau (en
plongeant du récif du diable, cela va de soit) que de faire la bise à un
inconnu dans le bus ou à une charmante demoiselle croisée dans la rue, s'inspire
de ce mythe qui nous passionne tant.
Force
est de constater, comme cela est d'ailleurs aussi le cas dans le milieux
littéraire voire visuel, que les artistes qui se réclament d'HPL sont de plus
en plus nombreux ces dernières années.
Et
c'est très bien, et c'est précisément pour ça que ce blog existe, nom d'un
Shoggoth.
Car
même si le rapport avec le Mythe de Lovecraft
reste parfois ténu et semble un prétexte mercantile plus qu'un réel hommage,
cela me permet ces derniers temps des découvertes musicales fabuleuses.
Souvent,
les yeux grands ouverts sur les ténèbres de ma chambre, lors de nuits dont les
heures semblent me priver de ce sommeil qui me serait pourtant d'un grand
réconfort, je pars à la découverte de groupes à la sus-dite inspiration sur le
ouèb.
C'est
ainsi qu'une nuit j'ai saisi le simple mot Nightgaunt
(on se demande bien pourquoi) dans le moteur de recherche de Bandcamp et
que je suis tombé sur ce groupe de doom italien qui n'avait, à l'époque, qu'un
album et un single à son actif.
La
magie a opéré tout de suite et, depuis ce moment, je n'ai de cesse de parler de
lui.
Ce qui
est amusant, au demeurant, c'est que, comme son nom ne l'indique pas,
l'inspiration première de ce combo n'est pas notre cher Howard. Non, non. L’œuvre dans laquelle puise allégrement ce
groupe, c'est celle d'Edgar. Edgar Allan
Poe. Celui à qui l'on doit tout. Celui qui a éveillé mon goût pour le genre
que j'adule aujourd'hui. Celui que je considère comme le maître absolu, la
fondation même du genre.
Mais
que cessent ici ces digressions.
Revenons
à nos émaciés nocturnes latins.
Le
groupe est donc constitué de quatre musiciens, Zenn aux guitares, Araas à la
basse, Tystnaden à la batterie et enfin GC aux guitares et chants. Même si
chacun participe à la création des morceaux, on retrouve GC à l'écriture de
toutes les paroles.
Quatre
talentueux artistes efficaces qui nous délivrent avec ce second opus, the Room, un magnifique album poesque à
souhait.
Les
guitares lourdes, les lignes de basse et de batterie tirées au cordeau, ces
chants impeccables, tout ceci a eu vite fait de fasciner ma pauvre âme et, même
si cela était loin d'être nécessaire, a confirmé tout le bien que je pensais
déjà de ce groupe.
Qu'en
est-il des chansons de ce nouvel album ? Pour le résumer, je vais me permettre
de simplement citer ce qu'en dit le groupe lui même :
"L'objectif de The Room est de transmettre tous les effets que la
perte d'un être cher peut avoir sur l'âme humaine : la rage, le désespoir, le
déni puis la dépression, toutes ces phases que l'on abordent et que l'on doit
affronter au cours du travail de deuil qui mène à l'acceptation.
Chacune des chansons évoque ces sentiments dans un
mélange sombre de violence et de musique, aussi lourde que peut être le
Maelström émotionnel qui engloutit l'individu confronté à la douleur sous toute
ses formes".
Les
paroles sont de véritables joyaux, présentés dans un écrin musical magnifique,
fait de satin et d'or le plus pur... mais bordées de guitares tranchantes et
de percussions puissantes.
La
peinture de la pochette est une œuvre de l'artiste italien Nicola Samori. Quant
aux photos intérieures, qui illustrent les paroles de chacune des chansons,
complétant ainsi parfaitement l'atmosphère de l'album, elles sont dues à
Moonlite (Carlotta Valente)
Essayer
de choisir une chanson préférée est simplement impossible. Même s'il ne s'agit
pas ici d'un concept-album, les six chansons qui le composent sont liées par ce
sentiment abordé plus haut, provoqué par la perte d'un être aimé.
A
savoir que la chanson Penance est une
nouvelle version de la face B de leur single Jupiter's Fall sorti en 2016 (aujourd'hui épuisé).
Alors,
chers amis, amies chères, faites moi plaisir en m'accompagnant dans ce voyage à
bord de la lourde mais oh! combien extraordinaire musique proposée par ce
groupe italien, dont le second album est tout simplement un incontournable du
genre.
Faisons
ce voyage ensemble, comme au delà de chacune des phrases, chacun des mots qui
en composent les paroles, derrière chacune des notes de guitares ou des rythmes
de batterie, nous ne garderons en mémoire qu'une seule chose... une chose
éternelle telle que le sourire habillant le visage livide d'une amoure décédée,
ou les rires d'enfants à jamais perdus dans les limbes du désespoir, ou encore
les yeux grands ouverts d'un parent nous fixant pour toujours...
Car,
tandis qu'inlassablement nous écouterons encore cette musique, cette poésie du
désespoir, qui insuffle la vie dans la mémoire des défunts, nous réaliserons
que, dans chacun des mots, dans chacune des notes, à chaque minute, chaque
seconde qui s'écoulent, ne subsiste plus que le souhait de voir le rideau final
descendre sur notre propre scène, afin d'être libéré de ces visions laissées
par ces êtres chers désormais absents, nous permettant ainsi, enfin, de jouer
éternellement ce drame, cette tragédie qui s'appelle homme et dont le héros est... le ver conquérant.
1 - The Room
2 - Penance
3 - Oval Portrait
4 - Veil
5 - Labyrinth
6 - The Owl
The Room est disponible au format CD, digital et en écoute libre sur la page du groupe :
Guitare et Chant : GC
Guitares : Zenn
Basse
: Arras
Batterie
:Tystnaden
Parution : 2 novembre 2018